YS,

Adaptation théâtrale de la légende de la ville

Editions Bargain, 2000.

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http://www.decitre.fr/livres/Ys.aspx/9782910373757
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Pour plus de renseignements: http://fr.wikipedia.org/wiki/Ys

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Galaad : Il est des vies peu communes. Des destins extraordinaires. Des histoires fabuleuses qui défient le temps et que l’on entend un soir, assis devant l’âtre. Acceptez de m’accorder quelques instants, et je vous raconterai justement une de ces histoires. Chez nous, tout le monde la cite sans vraiment la connaître. On se la répète de bouche à oreille. On l’accompagne d’une guitare. Elle est en nous, en nos mémoires, en nos cœurs. Cela se passait hier…Les grands-pères la racontent à leurs petits-enfants. Les jours disparaissent et le temps n’existe plus. Il n’y a plus de date, plus de chronomètre. Le temps se fixe à jamais. Je vous parle et vous n’imaginez pas un instant les siècles qui nous séparent.Le temps s’arrête. Maintenant. Nous fixons nos pensées et croisons nos regards. Ecoutez…Le vent souffle une mélodie. Entendez-vous ce chant ? C’est celui d’une sirène. La plus belle et la plus cruelle des sirènes. Une créature d’un autre monde. Une créature de légende. Une femme…Sa pensée hante mon esprit. Je ferme les yeux un instant et je la vois, là, près de moi. J’entends son rire et l’écho de sa voix résonne dans ma tête comme un cri strident. Son souvenir me blesse. Je fus le témoin de sa vie. Elle ne m’a jamais reconnu. Comme tous, moi aussi je l’aimais…

Je vais vous raconter cette histoire comme je vous confierais un secret. Cela soulage de se confier à quelqu’un. Je vais libérer ma conscience d’un poids trop lourd. Se taire est inutile. Comme une maladie, s’éteindre doucement. On souffre en silence et personne ne peut comprendre l’origine du mal. J’éprouve le besoin de vous dire cela pour tenir un engagement. Je fus le témoin d’une histoire peu banale. A peine croyable en réalité. D’aucuns diront qu’il ne s’agit que d’affabulation. Croyez-moi. Il y a des vérités qui mettent en doute les convictions les plus avérées. La Raison ignore tout de la Transcendance. Il n’est de plus grande chimère que d’espérer voir un jour Dieu. Vous ne pouvez que parier sur son existence…

Ce que je vais vous raconter à présent n’est que la triste réalité. Il y a de cela… bien longtemps, vivait en Cornouaille, au cœur de la Bretagne, dans la belle ville de Quimper un roi nommé Gradlon. Il était fort, courageux, respecté et aimé de son peuple. Alors qu’il guerroyait avec toutes ses troupes dans de lointaines contrées du Nord, il tomba follement amoureux d’une princesse, Malgwen, dont il voulait vaincre et piller le château. Au bout du compte, ce fut son cœur qu’il conquit.

Au retour de ces terres du Nord, Dieu voulut que le temps se gâtât. La nourriture se fit rare et les conditions de vie à bord du navire devinrent très rudes. Néanmoins Gradlon connut alors avec Malgwen un amour grandissant. Chaque jour qui s’écoulait était pour lui l’occasion d’admirer un peu plus sa beauté. Elle était fière et le vent semblait aviver tous ses charmes. Il soulevait ses longs cheveux pour couvrir l’horizon. Elle rayonnait et redonnait chaleur dans le cœur de leurs compagnons. Son ventre chaque jour plus imposant recueillait son bien le plus précieux : un enfant devait naître et témoigner de leur amour. Sa naissance fut le plus beau jour de la vie de Gradlon. Le destin, cruel destin, voulut qu’il fût aussi le plus terrible. Le bonheur doit-il s’adapter aux circonstances ou est-il annonciateur de malheurs proches ? Faut-il souffrir toute une vie pour n’être heureux qu’un seul instant ? Sitôt l’enfant au monde, sa mère, épuisée et éprouvée par le voyage, rendit son âme à Dieu avec sérénité et grandeur. Elle n’eut que le loisir d’admirer un instant sa chair et son sang, de lever les yeux vers Gradlon, des yeux emplis de larmes de bonheur et d’impuissance, puis ce regard plein de tendresse, d’amour et de confiance. Et c’est ainsi que rassurée, elle vogua vers d’autres cieux, sans aucune expression de crainte sur le visage. Elle ferma juste les yeux et ne soupira point. Elle semblait apaisée. Son enfant serré dans les bras, elle demeurait comblée à jamais. La détresse de Gradlon fut alors terrible. Il sombra dans le désespoir et ses pleurs n’eurent de cesse qu’au lendemain. Le corps de Malgwen fut paré telle une Walkyrie et confié à la protection de l’océan. Les flots la recouvrirent et elle disparut à jamais.

Ainsi naquit Ahès. La princesse Ahès. Image sublime et réincarnation de la beauté de sa mère, fée merveilleuse à l’allure altière. Son existence est peu commune, fruit de l’amour et de l’océan…

Devenue grande, Ahès s’ennuyait à Quimper. Il lui fallait un nouvel espace, pour jouir pleinement de sa jeunesse. Le bon roi Gradlon fit construire une ville nouvelle, au bord des flots. Une ville qu’il voulut extraordinaire et proche de l’océan en souvenir de Malgwen. Il la baptisa Ys. La ville d’Ys.

Cette cité est protégée de l’invasion des flots par une écluse, qui gère le débit de l’eau. On ne peut actionner ses lourdes portes de bronze qu’avec l’aide d’une clef. Qui possède cette clef contrôle l’existence d’Ys…

Une fois installée dans son domaine, Ahès prit en main l’avenir de la cité. Elle fit merveille et par prodige, embellit Ys d’une telle grâce que sa renommée devint exceptionnelle. De toute part accouraient barons et princes pour admirer la ville et demander à Gradlon la main de sa fille. Gradlon, qui ne se remit jamais de la mort de Malgwen, avait décidé, à force d’ennui et de mélancolie, de rejoindre Ahès au cœur d’Ys. Il laissait sa fille maîtresse de son propre destin.

Voilà, cher public, situé notre conte. Mon rôle fut bien modeste mais demeure essentiel pour que vive aujourd’hui, à travers mon récit, l’âme de cette ville merveilleuse et le souvenir de ces personnages extraordinaires. Veuillez maintenant écouter, amis, la légende de la ville d’Ys. L’Eternelle Ys.

Revue de presse